Composition (3) – Les éléments intermédiaires

Bonjour Les Amoureuses / eux du Monde du Silence !

Nikon D800 – ISO 320 105 mm – f/20 – 1/200 s

Dans ce nouvel article consacré à la composition de l’image, nous allons aborder des éléments qui vous permettrons d’aller un peu plus loin dans le langage visuel afin de mieux exprimer vos émotions face à la beauté du monde sous-marin (même en mer du Nord, même dans les lacs et carrières). Dans l’article précédent, nous avons vu les bases qui sont au nombre de 5.

  • Être au plus proche
  • L’arrière-plan
  • Point de vue
  • Principe des 1/3
  • Espaces et amputations

Si vous ne l’avez pas lu, vous le retrouverez en suivant ce lien: Composition (2) – Les bases

N.B. cette séparation entre les différents éléments est personnelle. Elle n’a rien d’académique et peut-être vous sentirez vous plus à l’aise de les pratiquer dans un autre ordre. Cependant, je les ai regroupés par ordre de facilité et d’importance dans la façon dont vous composez la photo: en allant du plus « grossier »: votre position: se déplacer, trouver le sujet, le cadrage, la position de votre appareils vers le plus fin (des choix plus subtils).

Dans ce second opus, nous allons voir des suggestions qui pourront être utilisées (ou pas) en complément des bases. Evidemment tout ne doit pas être utilisé simultanément, ce sont des outils à votre disposition pour créer une photo attractive.

Orientation et rapports d’aspects

Au début de la pratique photographique, nous avons tendance à faire des photos horizontales car c’est ainsi que l’appareil est disposé. Il en va de même lorsqu’il est dans son caisson. La prise de vue à l’horizontale n’est pas toujours la plus indiquée. Si votre sujet est vertical comme un tombant ou un poisson trompette au repos, une orientation verticale est préférable. En vertical, il est aussi plus facile d’inclure la surface. Ceci donne un plus grande impression de profondeur, une notion des dimensions présentes.

Nikon D800 – ISO 100 – 105 mm – f/14 – 1/125s

Bien qu’un changement d’orientation puisse se faire au développement, les lignes de fuite, l’angle de la lumière ne sont pas les mêmes lorsque l’on prend les photos « réellement » dans l’autre sens. Il est donc préférable de faire la photo dans le « bon » sens (=celui souhaité) dès le départ.

Outre le changement drastique de position à 90°, il est aussi possible de jouer avec l’inclinaison de l’appareil afin que les bords de la photo coïncident avec des lignes du sujet photographié (bastingage d’une épave, nageoire d’un poisson, …) ou pour créer une dynamique (via une diagonale qui n’est pas présente). Ceci ne porte généralement pas à conséquence dans l’équilibre de la photo tant que l’horizon n’est pas visible.

Similairement, lorsque vous prenez vos photos, vous êtes généralement liés à certains rapports de taille entre la hauteur et la largeur de votre photo. Cela a une influence sur la lecture, le rendu et les impressions qu’a le lecteur. Certains appareils permettent à la prise de vue  ou à l’édition des photos de choisir entre certains rapports. Par exemple carrée 1×1, 5/4, 4/3, 16/9.

Si votre appareil ne le permet pas, vous pouvez très bien le faire au développement de votre photo sur votre ordinateur.

Je développe cet aspect des rapports dans un article que vous retrouverez en suivant ce lien: Edition et cadrage

Simplification

Si le lecteur doit chercher le sujet dans la photo, il se fatiguera vite et quittera sa lecture. La raison de la photo doit lui sauter au yeux. Cela ne doit pas être compliqué. Pour arriver à montrer raidement son sujet, à le mettre en évidence, une photo simple et dépouillée est un atout. Il va donc falloir faire attention à ce que nous incluons dans notre photo. En effet, l’appareil ne sait pas ce que vous photographiez, quel est le sujet et encore moins ce dont vous voulez parler en mettant en scène votre sujet. Il va donc capter TOUT ce qui se trouve devant l’objectif et dans son champ de vision.

En tant que photographe, nous devons donc faire attention à ne rendre visible que ce que nous voulons inclure dans la photo en évitant des éléments de distraction.

  • Nous pouvons nous déplacer pour éviter d’inclure un élément gênant. L’arrière plan présenté dans l’article précédent en est un cas particulier.
  • Nous pouvons nous rapprocher pour remplir la photo avec le sujet, éliminant par là les alentours.
  • Ouvrir le diaphragme (chiffre « f » plus petit) pour rendre flou ce qui est plus éloigné du point de focus (là où nous avons fait la Mise Au Point – MAP).
  • Faire attention aux couleurs: qu’elles soient harmonieuses, complémentaires, …
  • L’isolation du sujet. J’ai présenté plus en détail ce point dans un article précédent que vous pouvez retrouver ici: Améliorez vos photos grâce à l’isolation
  • Au cours du développement, vous pouvez aussi jouer avec la désaturation et mettre en évidence une partie de la photo qui reste en couleur par rapport au reste qui est passé en N&B.
ARRière-plan intéressant
Sony RX100M5 – ISO 125 – f 6.3 – 1/80 s L’arrière-plan apporte du contexte (son lieu de vie) au sujet principal.

Précédemment, dans l’article sur les bases de la composition (Composition (2) – Les bases), je vous recommandais un arrière plan uni comme le bleu de l’eau. Ce n’est pas toujours possible et ce n’est pas forcément grave. Ce qui est important c’est d’avoir un arrière plan qui ne dérange pas. Vous pouvez même profiter de l’arrière-plan pour ajouter une note originale à votre photo, comme l’ajout d’une note de couleur qui est la couleur complémentaire de celle de votre sujet. Vous pouvez par exemple trouver une éponge avec un poisson qui passe devant.

Les couleurs complémentaires apporteront du dynamisme, de la tension, de la variété dans la photo. Inversement les couleurs similaires apporteront de l’équilibre, de la sérénité, de la stabilité.

Vous pouvez aussi utiliser un arrière-plan formé d’un motif répétitif, d’une texture. Ce motif sera rapidement assimilé par notre cerveau ce qui permettra au sujet principal de se détacher. Un sujet « lisse » dans un motif répétitif offrira un contraste qui renforcera la mise en évidence du sujet. C’est pour cette raison q’un poisson clown dans son anémone fonctionne bien: les couleurs sont différentes,  la structure répétitive de l’anémone contraste avec la forme du poisson.

L’arrière plan donne de la profondeur grâce à ces lignes de fuite et du contexte. Ce dernier peut faire se poser des questions sur ce qu’est cette structure.

L’arrière-plan peut aider à la lecture de l’image en incorporant des lignes directrices (nous verrons cela plus en détail dans le prochain article) qui peuvent être floues (car éloignées) ou elles peuvent être créées / suggérées par des ombres, des changements de couleurs, des motifs répétitifs, des rais de lumière, des espaces négatifs,…

Bref l’arrière-plan est le contexte de votre image et il faut bien le choisir. Ici il s’agit bien d’un niveau plus avancé que le simple arrière-plan bleu, qui reste néanmoins une valeur sûre et plus facile d’accès (Cf. article précédent)

Gérer un mauvais arrière-plan

Oui, mais … que faisons-nous lorsque nous avons un sujet « topissime », bien placé avec malheureusement un arrière plan pourri (confus, complexe, …) ?

Et bien nous avons plusieurs outils à notre disposition pour minimiser l’impact, la visibilité de cet arrière-plan disgracieux. Passons-les en revue

  • La profondeur de champ.
Snoot – Sony RX100 M5 – ISO 400 – 55 mm – f10 – 1/160 s

Nous allons faire appel au diaphragme qui gère la quantité de lumière qui rentre et … la profondeur de champ / zone de netteté. Ce point est le même que celui abordé dans le paragraphe « Simplification ». Pour plus de détails et des explications complémentaires je vous renvoie vers deux articles déjà publiés sur ce site: Le triangle de l’exposition – Ouverture (2/3) et Mise en pratique – La profondeur de champ.

L’idée est d’ouvrir le diaphragme  pour rendre la zone de netteté plus faible et faire en sorte que l’arrière-plan soit flou. nous gardons alors juste le sujet dans la zone de netteté (dans l’intervalle de la profondeur de champ).

A noter:

    • Le flash ou la lampe peuvent devenir trop puissants même à la puissance minimale.
    • Plus le sujet est éloigné de l’arrière-plan et est proche de l’objectif, plus c’est efficace et nous avons plus de latitude / de facilité.
  • Tuer la lumière ambiante
Snoot – Nikon D800 – ISO 640 – 60 mm – f18 – 1/200 s

Une autre façon d’estomper l’arrière-plan est de le plonger dans l’obscurité. Si ce dernier n’est pas éclairé par les flashs (suffisamment éloigné du sujet, orientation appropriée des flashs), nous pouvons fermer le diaphragme et augmenter au maximum la vitesse d’obturation (réduire le temps de pose). L’éclairage de notre sujet se fera par la lumière du flash, la lumière ambiante devenant trop faible pour le couple diaphragme / vitesse choisi (à sensibilité égale).

Vous me ferez remarquer peut-être, que juste avant je conseillais d’ouvrir le diaphragme et ici je recommande de le fermer. Contradiction ? Non, si votre arrière-plan n’est pas éclairé par les flashs. En effet, dans ce cas-ci, nous augmentons la profondeur de champ au risque de rendre l’arrière-plan plus net et donc plus dérangeant, mais puisque nous le plongeons dans l’obscurité en fermant le diaphragme ET en diminuant le temps de pose, l’arrière-plan sera non visible.

  • Utiliser un Snoot

Cet artifice fait appel à un accessoire que nous plaçons sur nos flashs: un cône qui réduit la zone éclairée. C’est une extension de la solution précédente. Afin que seul notre sujet soit bien éclairé et que l’arrière-plan ne le soit pas, nous réduisons le cône de lumière produit pas le flash. Nous pouvons alors plus facilement isoler notre sujet.

Pour plus de détail sur les snoots, je vous invite à lire (ou relire) l’article publié sur ce site web: Utilisation d’un Snoot en Macro

  • Cadrage serré

La dernière astuce consiste … à ne plus voir l’arrière-plan en se rapprochant du sujet, lui donnant ainsi toute la place dans le cadre de la photo. Au lieu de faire une photo du sujet dans son contexte, vous en faites une photo de « détail ». Votre sujet prend toute la place sur la photo, ou du moins suffisamment de place pour que l’arrière-plan soit réduit au maximum. Pour des raisons optiques, cette technique engendre également un arrière plan plus flou car la zone de netteté (profondeur de champ) se réduit lorsque vous vous rapprochez du sujet. (N.B. Cette astuce est aussi utilisée dans le paragraphe « simplification »).

A noter

Lorsque nous avons un mauvais arrière-plan, nous partons avec un handicap. Nous avons à notre disposition certaines astuces pour tout de même faire de belles photos. Ce ne seront sans doute pas celle que nous avions imaginées, ou que nous aurions souhaitées. Cependant, cette contrainte peut nous permettre de travailler ces techniques et obtenir des photos que nous n’avions pas planifiées. Les surprises et les bonheurs ne sont-il pas en dehors du cercle de confiance ? Sur un plan plus personnel, ne pas pouvoir faire tout ce que nous avons envie, c’est savoir gérer nos frustrations et savoir nous ouvrir aux opportunités et nous permettre d’évoluer.

Conclusion:

Nous voici équipés de nouvelles idées pour composer nos photos. Il n’est évidement pas nécessaire de toutes les appliquer en même temps. Pour les acquérir, il est préférable d’en travailler une à la fois, puis de les combiner lorsque c’est possible. Pour rappel, ces outils sont les suivants:

  • L’orientation est les rapports LxH de la photo
  • La simplification
  • Avoir un bon arrière-plan
  • Gérer un mauvais arrière-plan
    • Le rendre flou
    • Le mettre dans l’obscurité
    • Utiliser un snoot
    • Utiliser un cadrage serré
Snoot – Nikon D800 – ISO 640 – 60 mm – f18 – 1/200 s

Si ces techniques sont « évidentes » lorsque nous y pensons au sec en préparant notre plongée (en la fantasmant ?), nous y pensons pas forcément lorsque nous sommes sous l’eau pour prendre la photo. Nous avons en effet beaucoup d’autres paramètres à tenir à l’œil. C’est justement ce que la pratique, l’expérience nous apporte: y penser. Au fil du temps, cela devient un automatisme: nous regardons ce qui se trouve dans le cadre (notre écran LCD ou notre viseur), ce qui apporte quelque chose ou pas. Ce qui doit être enlevé, ce qui peut être modifié, ce qui peut être tenté. Bien entendu, nous n’avons pas toujours le temps de composer parfaitement notre photo lorsqu’il s’agit d’un animal rapide et peureux. Cependant en nous entraînant systématiquement, nous nous offrons plus de chance de réussir / d’améliorer nos photos techniquement plus difficiles. Et pour cela, une gorgone avec notre compagnon / compagne de plongée ou une prise de vue macro est tout indiqué: nous avons les commandes en mains. Prenez le temps, offrez-vous le plaisir d’apprendre, d’essayer. Même si cela semble contre-intuitif pour nous: autorisez-vous à échouer pour progresser. Au cours du temps, vous serez aguerris et gérerez vos compositions comme un passage d’embout, votre équilibre ou votre consommation.

D’ici notre prochain échange, je vous souhaite de bonnes plongées et belles photos

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